- ACÉTIQUE (ACIDE)
- ACÉTIQUE (ACIDE)L’acide acétique, acide organique de formule CH3COOH, est le membre le plus important de la famille des acides carboxyliques. Il joue avec ses dérivés un rôle essentiel dans de nombreuses synthèses et dégradations biologiques accompagnant le métabolisme des aliments et la formation des tissus. On le trouve à l’état libre dans la sueur et le sang. Il est présent également à l’état libre dans la sève des plantes et sous forme d’esters dans les fruits et dans les huiles essentielles. Étape finale de la fermentation d’un grand nombre de produits agricoles, il est aussi préparé en très grandes quantités par l’industrie. Celle-ci l’utilise comme solvant et comme intermédiaire dans la préparation de matières synthétiques: fibres textiles, vernis, plastiques, produits pharmaceutiques.En pharmacologie, on observe souvent un renforcement de l’activité après acétylation d’une molécule: la choline et l’acétylcholine, l’acide salicylique et l’acide acétylsalicylique (aspirine), la morphine et l’héroïne notamment.1. PropriétésAcétique vient du latin acetum , mot qui désignait chez les Romains le vinaigre, solution aqueuse diluée d’acide acétique. L’extraction et la purification du principe actif de ces solutions ont été tentées par de nombreux chimistes au cours des siècles. Il semble que ce soit J. T. Löwitz qui, à la fin du XVIIIe siècle, ait réussi, le premier, à isoler l’acide pur en combinant distillations et cristallisations fractionnées. C’est un liquide incolore, très mobile, dont l’odeur piquante rappelle celle du vinaigre. À la différence de l’acide à l’état impur, il cristallise très facilement lorsqu’il est refroidi. Ses cristaux ressemblent à ceux de la glace, d’où le nom d’acide acétique glacial encore couramment employé aujourd’hui et que lui donna Löwitz. La nomenclature internationale recommande l’usage du substantif éthanoïque.Fonction acideLe groupe fonctionnel de l’acide acétique est, comme celui de tous les acides carboxyliques (cf. acides CARBOXYLIQUES), représenté par la réunion d’une fonction carbonyle (CO) et d’une fonction hydroxyle (OH); toutefois, la conjugaison interne de l’ensemble des deux atomes d’oxygène et de l’atome de carbone (formules mésomères 1) implique une polarisation négative de l’atome d’oxygène carbonylique et une polarisation positive de l’atome d’oxygène hydroxylique. De cette situation de la distribution électronique de ce groupement fonctionnel résulte que l’oxygène carbonylique présente un caractère basique et que le groupement hydroxyle présente un caractère acide.Anhydre ou en solution dans des solvants non polaires (benzène, éther de pétrole), l’acide acétique ne manifeste pas ses propriétés acides: il ne décompose pas les carbonates et ne conduit pas le courant électrique. Par contre, en solution aqueuse, il se comporte comme un acide faible; il est notablement dissocié (pK a = 4,75).Ses solutions peuvent être titrées par la soude en présence de phénolphtaléine. Elles attaquent facilement le fer et le zinc en fournissant les acétates correspondants et de l’hydrogène:Comme tous les acides carboxyliques, l’éthanoïque réagit sur les alcools pour donner des esters (cf. 3 Applications ). Il peut être transformé en chlorure d’acétyle par substitution du chlore au groupement hydroxyle à l’aide du tri- ou du pentachlorure de phosphore. Ce chlorure, beaucoup plus réactif que l’acide dont il dérive, est préparé, pour certains usages industriels, en faisant réagir un mélange équimoléculaire de chlore et de gaz sulfureux sur l’acétate de sodium sec (réaction 3).C’est un liquide d’odeur suffocante qui fume à l’air.Il est cependant moins employé que l’anhydride parce que celui-ci, presque aussi réactif, a le double avantage d’être moins coûteux et beaucoup moins volatil. (Sa température d’ébullition est de 140 0C au lieu de 51 0C pour le chlorure.)Réactions de substitutionÀ côté de ces propriétés acides, l’éthanoïque se prête aux réactions habituelles des composés organiques et en particulier à des réactions de substitution. Les trois hydrogènes du méthyle sont remplaçables par des halogènes. Cette substitution par des éléments très électronégatifs avides d’électrons augmente très fortement l’acidité [cf. ACIDES ET BASES]. La chloration peut être effectuée à la lumière en présence de catalyseurs (phosphore rouge, iode). Il est possible d’obtenir les acides monochloracétique, dichloracétique et trichloracétique car les réactions (4) se font successivement.Dans l’industrie, l’acide monochloracétique est préparé par hydrolyse du trichloréthylène à chaud et en présence d’acide nitrique (réactions 5).L’acide trichloracétique, dont les applications sont plus nombreuses, est préparé soit par oxydation du chloral soit par hydrolyse de l’hexachloroéthane (réactions 6).Il se présente sous la forme de cristaux blancs; c’est un acide aussi fort que l’acide chlorhydrique. Il est très corrosif, seuls le platine et l’argent ne sont pas attaqués à chaud. On l’utilise pour les soins dentaires, pour brûler les verrues, mais aussi pour doser les protéines de l’urine et pour la préparation du chloroforme très pur par action de la soude:2. Préparations de l’acide acétique et de ses principaux dérivésAcide acétiqueContrairement au vinaigre, l’acide acétique, en tant que produit chimique, n’est pas préparé par fermentation de jus alcooliques. La plus ancienne méthode est la pyrolyse du bois. Fortement concurrencée par des méthodes synthétiques, elle ne subsiste que grâce à l’intérêt de ses sous-produits:– charbons de bois très utiles pour la cémentation et l’affinage des aciers mais aussi comme adsorbants industriels et comme supports de catalyseurs;– goudrons renfermant du furfural et des phénols.Une tonne de bois sec fournit environ de 40 à 50 litres d’acide acétique pur.Pendant de nombreuses années, la fabrication industrielle de l’acide acétique était fondée sur l’oxydation de l’acétaldéhyde à l’air ou à l’oxygène en présence de catalyseur (acétate de cobalt ou de manganèse). Autrefois préparé par hydratation de l’acétylène, l’acétaldéhyde est aujourd’hui fabriqué par oxydation de l’éthylène par l’oxygène en présence du couple PdCl2, CuCl2.D’autres procédés d’obtention de l’acide acétique se sont développés sur la base d’une dégradation oxydante d’hydrocarbures en C4 (butanes, butènes) ou de coupes d’essence légère (de C4 à C8) dans des conditions convenables de température et de pression (180-200 0C, 20-80 bars). Ces procédés conduisent à des mélanges complexes, nécessitant des séparations par distillation fractionnée, dans lesquels l’acide acétique, produit majeur, est accompagné d’autres acides carboxyliques (formique, propionique, succinique) et de produits d’oxydation divers (cétones, aldéhydes, alcools, esters).Le procédé usuel de fabrication de l’acide acétique est fondé sur la carbonylation du méthanol en catalyse homogène. Initialement réalisé sur catalyseur à base d’iodure de cobalt (CoI2) dans des conditions sévères – 250 0C, 600 bars (procédé B.A.S.F.) –, il est développé sur catalyseur à base de rhodium activé à l’iode: les conditions sont plus douces (150 0C, quelques bars), la sélectivité élevée (99 p. 100), et les unités de production ont une capacité importante – 150 000 tonnes par an (procédé Monsanto-Rhône-Poulenc).Anhydride acétiqueEn raison de ses nombreuses applications, l’anhydride acétique est également fabriqué en quantité importante selon deux procédés. Le premier réalise l’oxydation de l’acétaldéhyde en phase liquide catalysée par un mélange d’acétates de cuivre et de cobalt (50 0C, 4 bars) et produit un mélange d’acide et d’anhydride acétique (procédé Hoechst). Le second repose sur la déshydratation intramoléculaire de l’acide acétique en présence de phosphate triéthylique à 750 0C et sous pression réduite: le cétène qui se forme est refroidi brutalement (trempe) et réagit, à 50 0C, sur de l’acide acétique en formant l’anhydride pratiquement pur (procédé Wacker). Le même cétène peut être obtenu par thermolyse de l’acétone à 700 0C (réactions 7).3. ApplicationsAcétates métalliquesPresque tous les acétates métalliques sont solubles dans l’eau et sont fortement hydrolysés surtout à chaud. Les hydroxydes précipitent alors sous la forme de colloïdes. Ce phénomène est utilisé dans le mordançage des tissus. Les hydroxydes de fer ou d’aluminium insolubles fixent les colorants solubles sur les tissus.Les acétates de plomb et de cuivre ne sont plus employés en peinture à cause de leur toxicité. Celle-ci est mise à profit dans le vert de Paris, insecticide à base d’acétate et d’arsenite de cuivre.EstersLes acétates organiques, autrement dit les esters, sont beaucoup plus importants. Ce sont d’excellents solvants en particulier des nitrates et des acétates de cellulose. Par ailleurs, en présence d’éthanolate de sodium, l’acétate d’éthyle a la propriété de se condenser sur lui-même avec élimination d’éthanol pour donner l’acétylacétate d’éthyle (condensation de Claisen).Ce dernier est un composé dicarbonylé très utile pour certaines synthèses organiques en raison de la facilité avec laquelle, comme les composés organomagnésiens, il fournit des carbanions sur lesquels peuvent se fixer des réactifs électrophiles (cf.ester et synthèses ACÉTYLACÉTIQUES).Du point de vue industriel, les deux plus importants acétates restent cependant ceux de vinyle et de cellulose. Ce dernier a été découvert en 1869 par Schutzenberger mais n’a fait vraiment son apparition technique que durant la Première Guerre mondiale lorsqu’il a remplacé le nitrate dans la fabrication des ailes d’avion parce que beaucoup moins combustible.Il est préparé par l’action de l’anhydride acétique sur la cellulose. Dans une première étape il se forme un triacétate correspondant à l’estérification de tous les radicaux hydroxyle de la chaîne cellulosique.On procède ensuite à une hydrolyse partielle pour obtenir un dérivé cellulosique plus soluble dans l’acétone, c’est l’acétate dit secondaire. Le précipité obtenu est lavé et séché.Pour le filage, il est dissous dans l’acétone, la solution est pompée à travers des filières. Les fils sont ensuite coagulés et séchés. Ces fibres ont une bonne stabilité et sont facilement colorées. Des matières plastiques sont également préparées à partir de ce précipité en lui incorporant des plastifiants. Elles ont une grande dureté et une forte résistance mécanique.L’acétate de vinyle est préparé, en général en phase vapeur, en faisant réagir un grand excès d’acétylène sur de l’acide acétique. L’opération a lieu vers 200 0C en présence de catalyseurs au zinc et au cadmium. Un liquide incolore à odeur très pénétrante est obtenu. Il ne se polymérise qu’en présence de catalyseurs et donne des solides durs très stables à la chaleur. Il peut être copolymérisé avec d’autres composés vinyliques ou d’autres monomères. Il fournit aussi, en faisant varier la composition, toute une série de produits, selon les propriétés que l’on cherche à obtenir. L’acétate de polyvinyle, en solution dans divers solvants, est utilisé comme adhésif et dans les peintures à séchage rapide.Par saponification ou transestérification du polyacétate de vinyle, on prépare l’alcool polyvinylique, très utilisé comme matière première pour adhésifs et comme agent de finition pour l’industrie textile et la papeterie.4. Caractères analytiquesEn plus de son odeur, l’acide acétique peut être caractérisé par la coloration acajou qu’il donne en présence de chlorure ferrique. L’ébullition de cette solution précipite des acétates basiques puis de l’hydroxyde ferrique ocre. La calcination des acétates en présence d’anhydride arsénieux donne un dégagement d’oxyde de cacodyle reconnaissable à son odeur repoussante.
Encyclopédie Universelle. 2012.